Le prudhomme mieux que le loto ?

Cette citation d’une avocate Montpelliéraine avec laquelle nous travaillons sur des questions liées au droit du travail dans le cadre de la Convention Collective des Salariés du Particulier Employeur n’a jamais été aussi vérifiable car comme le titrait un article du Monde de novembre 2009, « la crise dope les recours devant les prud’hommes », et les particuliers-employeurs en situation de grande dépendance n’échappent pas à cette situation.

 

Sans revenir sur les nombreux motifs qui font qu’un particulier-employeur en  situation de grande dépendance peut se retrouver aux prud’hommes, sans remettre en cause les décisions prises par le Conseil des prud’hommes, depuis que nous travaillons sur ces questions et que nous étudions les jugements rendus, nous sommes très interrogatifs sur certains éléments qui fondent ces jugements.

  • Parce que la personne a besoin d’aide humaine 24 heures sur 24 et qu’elle a des difficultés d’élocution, comment une avocate peut plaider en faisant un raccourci scandaleux entre cette dépendance fonctionnelle et le fait que cette personne devrait relever d’un régime de tutelle ?
  • Comment condamner ces employeurs à des sommes dépassant les 10 000 € alors que ces personnes n’ont que 800 € par mois pour vivre ?
  • Comment des sommes venant de prestations insaisissables comme l’Allocation Adulte Handicapée (AAH) et la Prestation de Compensation du Handicap (PCH) peuvent faire l’objet de saisies attributions ?

 

Le droit du travail s’applique à tout le monde, c’est un fait incontestable, mais comment les conseillers prudhommaux et les avocats intervenant dans cette instance pourraient-ils connaitre la singularité de ces « patrons » et les éléments contextuels qui régissent et rendent si particulière leur fonction d’employeur ?

  • Savent-ils ce qu’est une personne en situation de grande dépendance ?
  • Savent-ils quels sont ses besoins ?
  • Savent-ils comment répondre aux besoins d’aide humaine, comment vivre dignement quand on a besoin d’aide humaine 24 heures sur 24 ?
  • Connaissent-ils les modalités générales d’organisation de la réponse aux besoins d’aide humaine ? Les Avantages et les inconvénients du mode prestataire et de l’emploi direct ?
  • Savent-ils pourquoi les particuliers-employeurs en situation de grande dépendance choisissent de faire de  l’emploi direct ?
  • Savent-ils ce que signifie faire de l’emploi direct quand on est dépendant, quand on est vulnérable, quand on ne peut pas parler..?
  • Savent-ils que dans ce contexte le domicile est le lieu privilégié d’une relation employeur-employé et de l’exercice d’un management particuliers ?
  • Connaissent-ils le contexte législatif : la compensation ?
  • Savent-ils que la majorité des particuliers-employeurs en situation de grande dépendance, sont des employeurs qui n’ont pas les moyens personnels d’embaucher des salariés mais qui ont besoin de ces aidants pour vivre !


Comment plaider, comment juger et prononcer des condamnations qui ont un sens si on ne connaît pas ces éléments ?

C’est difficile, voir impossible ! C’est pourquoi, nous souhaitons dans les prochaines semaines proposer une formation aux Conseillers Prudhommaux et aux Avocats.

Emmanuel Loustalot

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